Compte
rendu
Forum
des initiatives citoyennes en Provence-Alpes-Côte
d'Azur, La Baume-les-Aix,
12 avril 2003
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I
- Les motifs d’une rencontre
Le
12 avril 2003, à La Baume les Aix une quarantaine
de militants de mouvements citoyens, associatifs, syndicalistes,
venus du Vaucluse, des Hautes-Alpes, du Var et des Bouches-du-Rhône.
(André Aschiéri, maire de Mouans-Sartoux dans
les Alpes maritimes était excusé) se sont
réunis, pour la seconde fois, à l’initiative
du Forum de la gauche citoyenne et de la Convention citoyenne,
pour échanger et réfléchir dans la
perspective des élections régionales au printemps
2004.
Pour
la plupart d’entre eux, militants associatifs ou/et
politiques, ils sont fortement impliqués dans la
vie locale et considèrent que la Région est
(ou devrait être) un lieu important du fonctionnement
du système démocratique et de développement
de l’intérêt collectif. Ils se mobilisent
car, s’ils croient en l’avenir de l’institution
régionale, ils sont très inquiets quant aux
résultats prévisibles, mais aussi quant aux
conditions dans lesquelles se préparent et se dérouleront
les prochaines échéances électorales
dans moins d’un an.
- L’abstention
déjà forte aux dernières élections
similaires risque de s’accentuer, confirmant le
désintérêt sinon le dégoût
des citoyens pour la vie politique. Cette attitude qui
semble se généraliser porte une grave atteinte
au système démocratique.
- L’histoire
récente démontre en effet que l’extrême
droite a conservé une capacité de nuisance
dans la Région et qu’il serait dangereux
de négliger ou de sous-estimer son poids dans l’opinion.
- Les
avatars des récentes modifications de la loi électorale
font craindre une lassitude croissante de l’électorat
et en tout cas une confusion totale dans les choix et
les listes qui seront proposés aux citoyens. Comme
l’a précisé le Conseil constitutionnel,
le gouvernement a le devoir de nous fournir des explications
sur ce que l’on est en droit d’appeler une
usine à gaz électorale.
- Les
conditions de fonctionnement de l’institution régionale
et de l’assemblée, depuis plusieurs années,
n’incitent pas le citoyen à s’y intéresser.
- Les
projets de lois de décentralisation qui visent
à donner en particulier aux Régions des
pouvoirs et des moyens accrus, ne seront pas un progrès
pour la démocratie s’ils ne sont accompagnés
d’un renforcement significatif des moyens de contrôle
des citoyens et de la mise en place de contre-pouvoirs
efficaces.
Cette
inquiétude partagée a conduit les participants
à poursuivre leur réflexion en commun, à
échanger leurs expériences et à esquisser
une méthode de travail et des pistes de propositions.
II
– La démocratie représentative en question
Dans
leur grande majorité, les habitants de cette Provence
Alpes Côte d’Azur connaissent à peine
son existence et ses limites géographiques, son rôle,
son mode de fonctionnement et souvent même le nom
de ses élus. Seuls, ceux qui ont directement à
faire avec l’institution sont partiellement informés
de ce que l’on peut en attendre, en matière
de subventions notamment. La Région représente
alors pour eux un guichet plus ou moins compliqué
à comprendre et à utiliser. Combien d’entre
nous sont-ils à même de définir les
priorités régionales ? Quelles sont les principales
orientations de la politique régionale ? Peut-on
même situer clairement la Région sur l’éventail
politique ? Autant de questions sans réponse qui
montrent que cette institution bientôt trentenaire
n’a pas su prendre sa place dans un fonctionnement
démocratique du territoire.
Cette
distance entre le citoyen et l’institution se conjugue
avec un système de représentation et de décision
archaïque fonctionnant traditionnellement « du
haut vers le bas ». La Région n’est certes
pas avare en matière de politique de communication,
en particulier à l’approche des périodes
électorales, mais cette information demeure très
formelle à l’exemple de ces multiples «
ateliers de réflexion » thématiques
organisés depuis quelques semaines et qui se proposent
de réunir les citoyens de la Région (à
12 mois de la fin d’un mandat) pour « débattre
et prendre en compte les besoins de la population ».
À
l’inverse, il est surprenant de constater combien
il est difficile sinon impossible pour un habitant, s’adressant
à la Région d’obtenir une réponse
ou, plus encore, pour un groupe de citoyens porteur d’un
projet, de trouver un interlocuteur ! Reconnaissons que
cette relation descendante entre l’élu et le
citoyen n’est pas propre à l’institution
régionale, mais est le reflet de la crise de la démocratie
représentative à tous les échelons
de la société.
Cet
autisme de l’institution régionale a conduit
certains élus à constituer une nouvelle forme
de féodalité, fondée sur un clientélisme
souvent efficace, favorisé par un cumul de mandat
presque systématique. L’appartenance politique
n’a alors que peu de signification hormis au moment
de la désignation des candidats à la candidature.
Dans
un tel contexte, il n’est pas étonnant de constater
qu’à cette méconnaissance d’une
bonne partie de la population régionale s’ajoute
le désintérêt croissant des citoyens,
des militants associatifs ou politiques qui croient cependant
au rôle indispensable d’une politique régionale.
Cette analyse confirme l’inquiétude des participants
et notre responsabilité individuelle et collective.
Nous devons tout mettre en œuvre pour combattre ce
désintérêt et mobiliser les abstentionnistes
actuels et futurs en tentant de les convaincre que la Région
peut avoir un sens.
III--
Un fonctionnement contestable de l’institution régionale
Le
fonctionnement administratif quotidien de la Région
composé de plus d’un millier de fonctionnaires
et d’une centaine d’élus, manque sérieusement
de transparence et de moyens d’évaluation à
la disposition des citoyens. Si la représentativité
de son président n’est pas en cause, il y a
cependant loin du discours à la mise en œuvre
des programmes d’intérêt général
et les messages régionaux vis-à-vis de l’opinion
relèvent trop souvent de l’incantation.
La
structure administrative qui comporte des experts qualifiés
ne joue pas son rôle de proposition de projets alternatifs
ouvrant des choix aux élus. Le cloisonnement entre
les services ne permet pas l’élaboration et
la prise en compte de programmes transversaux ou de projets
de territoires issus des citoyens.
L’absence
d’un projet politique régional accessible et
clairement affiché conduit le Conseil régional
à se comporter comme un Conseil général
privilégiant la gestion des moyens et la distribution
de subventions dans un consensus formel permettant à
chaque élu d’y trouver son compte.
IV-
Une nouvelle ambition pour l’avenir de notre Région
Si
le diagnostic ci-dessus peut apparaître sévère,
il ne doit pas nous conduire à minimiser ou encore
moins ignorer les échéances régionales
de 2004, mais au contraire nous inciter à bâtir
ensemble des propositions permettant de remédier
aux dysfonctionnements mentionnés et proposer aux
habitants de la région une perspective mobilisatrice.
C’est
le sens de la démarche engagée avec l’appui,
à l’échelon national, du Forum de la
gauche citoyenne et qui doit nous permettre d’établir
des cahiers de revendications et de propositions à
l’automne prochain.
Les
premières esquisses de ce dossier évoquées
lors de la rencontre du 12 avril peuvent se résumer
ainsi :
Sur
le fonctionnement démocratique et la relation avec
les citoyens :
- Suppression
du cumul des mandats et limitation des renouvellements.
- Obligation
d’évaluations régulières et
de comptes rendus de mandats.
- Clarification
du rôle des partis politiques dans la désignation
des candidats.
- Transparence
du fonctionnement et des délibérations de
l’assemblée régionale.
- Distinction
des responsabilités entre l’assemblée
délibérative et l’exécutif
régional.
- Clarification
des responsabilités entre les différents
niveaux de territoires (Communes, communautés d’agglomérations,
départements etc.) et réduction à
minimum des financements croisés.
L’élaboration
d’un projet politique pour la Région :
- La
Région, garante de l’intérêt
général, doit se positionner comme arbitre
au-dessus des intérêts et des particularismes
locaux des communes ou des départements.
- Elle
doit fixer ses priorités sur des dossiers concrets
concernant la vie des citoyens tels que l’éducation
et la formation, les transports collectifs, l’environnement
et quelques autres. Sur chacun de ces dossiers, devra
se constituer un véritable dialogue avec tous ceux
qui sur le terrain ont des responsabilités opérationnelles
dans ces domaines.
- Il
convient d’inverser les mécanismes de décision
actuelle. La Région doit être à même
de négocier et de prendre en compte des projets
et de programmes établis à l’échelon
local.
- La
Région doit devenir un lieu fédérateur
des ambitions régionales en particulier vis-à-vis
de nos voisins proches ou lointains. Elle doit mettre
en valeur ses atouts qui concernent non seulement le patrimoine
écologique et culturel, mais aussi la diversité
de ses sites de son histoire et de sa population. Dans
ce domaine, il n’est plus temps d’être
sur la défensive mais au contraire de montrer au
monde que l’on peut vivre ensemble dans le respect
réciproque de nos origines en additionnant nos
richesses.
V-
Une démarche à poursuivre
Les
participants à cette rencontre conviennent de poursuivre
la démarche engagée et discutent de l’objectif,
pour l’automne prochain, d’organiser «des
États généraux des initiatives citoyennes
en Provence-Alpes-Côte-d’Azur»
qui porteront des « Cahiers de revendications et de
propositions » présentés à l’échelon
national.
D’ici
là, les groupes de proposition locaux auront pour
charge de débattre des éléments d’analyse
ci-dessus, de recenser les associations ou mouvements locaux
intéressés par la démarche et de rassembler
les initiatives et projets locaux pouvant s’inscrire
dans cette dynamique de renouveau démocratique.
La
prochaine rencontre régionale prévue le samedi
28 juin aura pour objectif de fournir le plan et les principaux
contenus des cahiers pour permettre une rédaction
avant la fin de l’été.
Marseille le 15 avril 2003
Alain
FOUREST
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