Cap
sur les régionales !
L’instauration
d’un pôle participatif de gouvernance modifiant
le règne actuellement exclusif des partis pourrit
se concrétiser pour mars 2004.
Les formes traditionnelles de la démocratie (élections
au suffrage universel,pluralisme des partis…) sont
nécessaires, mais elles sont insuffisantes, face
à la montée d’une crise de la représentation,
qui est universelle et sans doute irréversible. Nous
avons ailleurs déjà débattu de la nécessité
de compléter la vieille démocratie de délégation
par une démocratie participative(1). Nous voudrions
ici contribuer au débat sur la nouvelle articulation
à rechercher entre, d’une part, les citoyens
et le mouvement associatif, et, d’autre part, les
partis politiques. Comme ce débat risque de rester
trop longtemps au niveau des pétitions de principes
et des discours dominicaux, nous voudrions le concrétiser,
en nous appuyant sur la prochaine échéance
électorale importante qui sera, dans notre pays,
les élections régionales de mars 2004.
Pour l’instant, le discours des partis de la gauche
ex plurielle ou de la LCR, est de manifester une volonté
de «dialogue et d’ouverture» à
l’égard de la société civile
(le plus souvent indéfinie). Ils s’apprêtent
donc, dans la préparation de leurs congrès
respectifs, à inviter (ils n’ont plus les moyens
de convoquer) tous ces acteurs à débattre
: de quoi ? De tout et de rien. Pourquoi ? A la rigueur,
pour régénérer leur discours, sans
aucune garantie sur la misse en œuvre future d’une
quelconque politique : nos sommes typiquement dans le cadre
d’une démarche descendante, pour ne pas dire
condescendante, qui va des puissants de ce monde vers les
« gens d’en bas » (même si tout
le monde ne parle pas exactement le Raffarin dans le texte).
Cette démarche, quoique plus sympathique que l’arrogance
des partis naguère au gouvernement, n’aura
évidemment qu’un résultat illusoire,
tellement elles est éloignée des aspirations
qui se manifestent depuis longtemps dans la masse des citoyens,
et qui ont fait un moment irruption, entre les deux tours
de la présidentielle. Beaucoup de « chefs »
politiques le savent bien, qui ne manifestent cette volonté
d’ouverture que pour marquer des points vis-à-vis
de leurs concurrents des autres partis… ou du leur,
lors de la préparation de leur congrès. On
ne doit cependant pas sen contenter de fustiger cette sorte
d’hommage que, rendu un moment modeste par la défaite,
le vice rendrait soudain la vertu…Il faut acter positivement
le consensus général qui règne aujourd’hui
à gauche, dans pratiquement tous les partis, sur
la nécessité d’inventer une nouvelle
articulation entre la masse des citoyens et les responsables
des partis. Il s’agit surtout de remettre sur ses
pieds une relation que ces derniers voudraient faire marcher
sur sa tête : à leur démarche descendante
(à laquelle on peut toujours se rendre par politesse
et pour en vérifier le caractère condescendant),
il faut opposer une démarche ascendante, celle par
laquelle les citoyens eux-mêmes convieront les responsables
des partis (toujours soucieux de leur candidatures à
la prochaine élection) pour faire part de leur propositions
et revendications. Notons immédiatement qu’une
telle démarche (qui révolutionne la figure
traditionnelle, en ce que les partis y figurent d’avantage
comme une « arrière-garde éclairée
» par la masse des citoyens) peut valoir pour n’importe
quel type d’élections : c’est ainsi que
le Forum de la Gauche Citoyenne à l’intention
de le proposer, lors du Forum Social de Florence, pour les
prochaines élections européennes.
Les élections régionales de mars 2003 nous
en fournissent une seconde occasion, évidemment moins
difficile à mettre en œuvre, compte tenu de
la moindre hétérogénéité
des cultures politiques dans un cadre nationale. Il s’agit
donc, dans toutes les régions de France, (métropolitaines
et d’outre-mer) que des associations et groupes de
citoyens, se reconnaissant dans les valeurs de la gauche,
élaborent en commun leurs cahiers régionaux
(limousins, rhône-alpins, normands, franciliens, etc…)
de propositions et de revendications dans la forme qu’ils
souhaiteront leur donner, complets ou incomplets…
Cette autonomie des démarches (non seulement vis-à-vis
des partis, mais aussi des initiateurs nationaux) pourrait
se donner deux limites, afin de gagner en efficacité
: d’une part, un échange, et si possible, une
véritable mutualisation de ces expériences
; d’autre part, une date butoir, pour rendre publique
une première rédaction de chaque cahier régional
: on suggérera ici, le 1er octobre 2003, 6 mois avant
les élections régionales, de façon
à exercer une influence maximale sur celles-ci, ni
trop tôt, ni trop tard. D’un point de vue pratique,
la troisième Université d’automne du
Forum de la Gauche Citoyenne, pourrait être principalement
consacrée à la discussion et l’enrichissement
de toutes ces initiatives régionales.
La question de l’usage que feront de ces cahiers régionaux
leurs instigateurs doit être laissée complètement
ouverte, et pourra être d’ailleurs différente
d’une région à l’autre, voire
au sein d’une même région (encore que
dans ce cas de figure risque de nuire à la compréhension
de la démarche par le plus grand nombre de citoyens).
Pour bien nous faire comprendre, notamment des appareils
de parti, disons que les auteurs des cahiers auront trois
grandes façons de les valoriser :
-en les proposant aux partis habituels, et, si possible,
en les transformant en un véritable « contrat
de mandature », dans une logique pouvant rappeler
la démarche d’un Pierre Mendès-France
;
-en poussant encore plus loin l’intégration
dans le processus électoral, par une présence
sur les listes de candidatures de te ou tel parti, avec
comme déontologie évidente pour ces candidats,
de ne pas prétendre parler au nom de tous les auteurs
de cahiers(2), dont bon nombre auront préféré
ne pas se présenter aux élections ;
-en constituant leur propre liste citoyenne comme on en
vit déjà bon nombre, lors de ces dernières
municipales, avec l’avantage cette fois d’une
plus grande expérience, d’une meilleure préparation
et de l’inscription dans une démarche plus
globale de citoyenneté.
Bien entendu, le fait de maintenir ouvertes pendant quelque
temps des trois possibilités, augmentera de façon
importante la crédibilité de cette démarche
vis-à-vis des appareils régionaux (et nationaux)
des partis.
Cette initiative de rédaction de cahiers de propositions
et de revendications, dans chaque région pourrait
démarrer dès le mois d’Octobre, là
où le Forum de la Gauche Citoyenne est déjà
organisé en tant que tel. Mais, on peut simultanément
lancer un appel à tous les militants des autres réseaux
de citoyenneté active et à nos adhérents
non organisés sur une base régionale, pour
que dans la plupart des autres régions, des initiatives
de même type soient prises dans les prochaines semaines.
Enfin, l’ensemble de notre réseau et de ses
partenaires habituels doit se sentir mobilisé pour
aider aux lancements de toutes ces initiatives régionales
et pour tenter d’en capitaliser les résultats,
autant que faire se peut, en temps réel. A cet égard,
un ou deux membres du collectif national d’animation,
si possible eux-mêmes impliqués dans de tells
démarches régionales pourraient jouer le rôle
de femmes ou d’hommes ressource, auprès de
tous ceux qui voudront les solliciter dans ce que cette
démarche à d’inédite.
Dominique
Taddei
1 Cf. C.Braillon et D.Taddei, « Vers une démocratie
participative », revue Mouvements, n°23, septembre-octobre
2002
2 Une formule convenue par avance du type « co-animateur
des cahiers régionaux » pourrait réduire
les tensions nées du risque (réel ou supposé)
d’accaparement.
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