Les
aspects sociaux de la future Constitution européenne
vus par Liaisons sociales
Les
chefs d’État des vingt -cinq États membres
de l’UE ont signé, le 29 octobre, à
Rome, une Constitution européenne destinée
à remplacer l’actuel traité de l’UE.
Cette Constitution, dont le projet a été adopté
lors de la Conférence intergouvernementale des 17
et 18 juin derniers, devra ensuite être ratifiée
par chaque État membre avant d’entrer en vigueur,
en principe, le 1er novembre 2004. Si ce texte ne présente
pas d’avancées importantes en matière
sociale par rapport au traité de Nice (sauf en matière
de santé publique, non abordée ici), on peut
néanmoins se réjouir de son adoption et saluer
certaines de ses dispositions. En effet, ce texte fixe des
objectifs sociaux tels qu’« une économie
sociale de marché hautement compétitive, qui
tend au plein emploi et au progrès social »
(art. I-3) et reconnaît le dialogue social, ainsi
que le rôle des services publics. De plus, la Constitution
inclut désormais la Charte des droits sociaux fondamentaux.
Enfin, le texte renforce le rôle du Parlement européen
qui, en matière sociale, est plus progressiste que
le Conseil.
Droits sociaux fondamentaux et politique sociale La Constitution
introduit la Charte des droits fondamentaux de l’Union
proclamée à Nice en décembre 2000.
La charte reprend, en un texte unique, l’ensemble
des droits civiques, politiques, économiques et sociaux
des citoyens européens, tels que la liberté
de s’affilier à un syndicat ou le « droit
à l’information et à la consultation
des travailleurs au sein de l’entreprise ».
La procédure d’adoption des textes communautaires
relatifs à la politique sociale est inchangée
par rapport à celle prévue par le traité.
En effet, ces domaines sont soumis au vote à la majorité
qualifiée du Conseil, à l’exception
de quatre thèmes nécessitant l’unanimité
de ses membres : la sécurité sociale et la
protection sociale des travailleurs, la protection des travailleurs
en cas de résiliation du contrat de travail, la représentation
et la défense collective des intérêts
des travailleurs et des employeurs, et enfin les conditions
d’emploi des ressortissants des pays tiers en séjour
régulier sur le territoire de l’Union. Les
mesures communautaires destinées à lutter
contre les discriminations (fondées sur le sexe,
la race, l’âge, l’orientation sexuelle…)
restent soumises au vote du Conseil à l’unanimité.
Dialogue social et MOC Concernant le dialogue social, l’article
I-47 de la future Constitution, « reconnaît
et promeut le rôle des partenaires sociaux au niveau
de l’Union, en prenant en compte la diversité
des systèmes nationaux ; elle facilite le dialogue
entre eux, dans le respect de leur autonomie. Le sommet
social tripartite pour la croissance et l’emploi contribue
au dialogue social ». Par ailleurs, la méthode
ouverte de coordination (MOC), qui avait fait son entrée
en force dans le traité de Nice est pleinement reconnue
(art. I-11). Elle est destinée à faciliter
la coordination des actions des États membres «
dans tous les domaines de la politique sociale »,
comme l’emploi, le droit du travail, la sécurité
sociale… Services publics La Constitution reconnaît
les services publics. D’une part, dans le cadre de
la Charte des droits sociaux fondamentaux, l’article
II-36 dispose que « l’Union reconnaît
et respecte l’accès aux services d’intérêt
économique général tel qu’il
est prévu par les égislations et pratiques
nationales, conformément à la Constitution,
afin de promouvoir la cohésion sociale et territoriale
de l’Union ». D’autre part, l’article
III-6 de la Constitution reprend les dispositions de l’article
16 du traité relatives à la valeur et au rôle
de ces services, énonçant que l’Union
et ses États membres veillent à leur fonctionnement.
Néanmoins, le nouveau texte va plus loin, et dispose
que la réglementation européenne ne saurait
faire obstacle à la compétence des États
de fournir, de faire exécuter et de financer ces
services. Libre circulation et immigration Les dispositions
sur la liberté de circulation des travailleurs sont
rigoureusement les mêmes que celles énoncées
dans le traité. À la différence que
dans le domaine de la sécurité sociale, les
mesures relatives à la libre circulation des travailleurs
(totalisation et exportation des prestations) sont cette
fois soumises au vote à la majorité qualifiée
du Conseil et non plus à ’unanimité
(art. III-21). Par ailleurs, la Constitution refonde les
dispositions du traité relatives à l’asile
et à l’immigration. La politique relative à
l’asile et à l’immigration fera notamment
l’objet d’un vote du Conseil à la majorité
qualifiée, alors qu’aux termes du traité
de Nice bon nombre de mesures en la matière était
soumise à l’unanimité.
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